DOCUMENTATION – Dès 15 ans (Pépite d’Opalivres)**
De Romain HURET( historien des USA et membre de l’Institut Universitaire de France)
Dans la série “Troisième Culture”
Éditions Thierry Magnier – 9,80€
Partir d’un événement pour éclairer un fait de société, c’est le projet d’une série dont on connaît le caractère percutant, la rigueur et la pertinence.
L’événement, c’est cette fois l’ouragan Katrina :
- qui donne à voir un concentré exceptionnel de pauvreté nationale dans une ville afro américaine
- qui hisse dans la catégorie de « réfugiés » dans leur propre pays vieilles femmes édentées, drogués en cure de désintoxication, petits blancs pauvres (white trash) et citoyens de seconde classe (underclass)…
Celle qui porte la caméra, c’est Kimberly, un pur produit de cette sous-catégorie de citoyens qui sont restés :
– pour ne pas laisser leur maison,
– pour ne pas laisser leurs animaux domestiques
- parce qu’ils n’avaient pas de véhicule,
- parce qu’ils ne pouvaient acquitter le prix de l’essence ou celui de l’hôtel
- ou plus simplement par souci d’affirmer leur appartenance à une communauté qui n’a rien à voir avec la « protection à l’américaine » que l’on pouvait trouver dans le « superdôme » de sinistre mémoire.
L’odyssée de ces « citoyens » aux prises avec les ambiguïtés et les réalités de la solidarité à l’américaine va permettre à Romain Huret de revisiter le mythe des pauvres en Amérique.
Il va d’abord situer son étude en rappelant qu’il n’y a pas de place pour la pauvreté dans un contrat social américain qui veut d’abord mettre la richesse et la prospérité à la portée de tous. Dans un tel contexte la pauvreté ne peut être qu’une « anomalie temporaire ».
Il constate :
- que « l’Amérique des pauvres » occupe plus souvent la scène artistique que celle de la vie politique. La culture célèbre la beauté du pauvre, héros du quotidien dans un monde hostile, et éloigne des réalités.
- le paradoxe étonnant des institutions de solidarité vécues comme des forces hostiles
- l’assimilation par les pauvres du discours politique des plus conservateurs.
- les indicateurs tangibles d’une pauvreté qui progresse
- les jugements de valeur sur les bons et les mauvais pauvres ( deserving poor ou undeserving poor )
- la suspicion de fraude à l’égard de tout dispositif de solidarité qui perdure ou se développe
- les explications morales, comportementales, raciales, mentales ou psychologiques comme justification à un refus de l’état de pauvreté
- la dévolution de la solidarité aux organismes caritatifs, religieux ou ethniques
- l’échec constant des présidents à vouloir mettre en œuvre un système d’assurance maladie universel
L’ouvrage souligne la perplexité des chercheurs européens devant le paradoxe d(‘un modèle américain dont la vitalité semble se nourrir d’une pauvreté constamment refoulée.
Il s’achève par le constat que les systèmes sociaux très largement développés en Europe n’arrive pas non plus à éradiquer la pauvreté dans nos sociétés et contribuent implicitement à un affaiblissement de leur vitalité.
L’ouvrage est complété par :
– des notes qui renvoient à des ouvrages de références anglo saxons
– un lexique des concepts clés
– une bibliographie très efficace.
L’ouvrage est destiné à des lycéens ou à des étudiants en histoire, économie, sociologie ou civilisation américaine.
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