Histoire du génocide des Arméniens ♥

BANDE DESSINÉE/DOCUMENTAIRE – Pour tous – Dès 14 ans
Scénario de Gorune APRIKIAN
Documentation Jean-Blaise DJIAN
Dessins de Kyungeun  PARK
Éditions Petit à petit – Distribution Hachette – 19,90€                   

 « Une histoire du génocide Arménien », les Éditions Petit à petit  font le projet, avec cette Docu-BD  de donner au lecteur jeune ou moins jeune un outil pour appréhender les réalités, l’horreur et les enjeux autour d’un évènement à peine abordé dans les programmes d’histoire mais qui continue à trouver un écho dans le monde d’aujourd’hui qu’il soit nié ou qu’il nourrisse encore des conflits sans fin que les grandes puissances manipulent pour le mieux de leurs intérêts.

Dans l’esprit de la collection, les auteurs conjuguent une documentation historique illustrée qui ouvre toutes les portes de la recherche avec une BD qui met en scène le vécu de trois jeunes enfants emportés dans cette tourmente, Mikaël un jeune arménien, sa sœur Anouche et leur copain Ali le turc fils d’Hussein le maire honnête et respecté.

Pour échapper à la déportation Mickael rejoindra la maison du maire déguisée en fille qui porte la burqa et derrière son voile, il va voir et vivre au plus près ce qui se joue quand tous les arméniens sont partis ou se cachent.
Ali découvrira ce qu’il advient des arméniens mobilisés qui creusent le  jour la tranchée dans laquelle ils seront fusillés la nuit venue.
Ensemble ils vont découvrir une société délétère où tout le monde soupçonne tout le monde.
Leur amitié et leur révolte naïve sont une bouffée d’air frais  dans un monde où Hussein peine à leur expliquer qu’avancer masqué est souvent une forme de résistance passive qui permet de survivre en préservant ses convictions.

Anouche va accompagner sa mère en déportation et vivre son calvaire, celui des marches interminables de la faim, de la soif, des mauvais traitements jusqu’au pont où elles seront massacrées par ce qui ressemble à des « bachi bouzouk » . Elle aura la vie sauve par la volonté d’un officier qui en fait sa propriété et dont elle sera libérée par l’armée anglaise à Mossoul en 1919.

Le dessin, dans des tons jaunes, a l’aridité des zones désertiques dans lesquelles se jouent ces évènements tragiques.
Les détails les plus anodins expriment la souffrance et des plans panoramiques donnent une ampleur biblique à ces longues colonnes de femmes qui cheminent vers la mort.

A chaque temps fort de cette grande fresque épique, une vignette colorée extraite du dessin ouvre une porte sur la documentation historique illustrée qui permet de situer un moment de la fiction dans la chronologie d’une longue histoire d’où émergent les origines et les réalités du fait arménien.

Au début était l’empire de Tigrane II le Grand qui s’étendait du Caucase à la Palestine et qui refusa de livrer Mithridate aux romains et dut se soumettre à Pompée.
Le Royaume d’ Arménie cultiva dès lors une identité forte qui au long des siècles en fit le premier état organisé autour d’un christianisme indépendant avec une langue et un alphabet propre.

L’histoire de l’Arménie s’inscrit sur la ligne de fractures entre des grands empires rivaux et alternent des périodes d’indépendance, d’autonomie  ou d’occupation par ces grandes puissances.

Le génocide arménien est un moment d’affrontement avec l’empire ottoman qui court d’Avril 1915 à juillet 1923 et qui fera au moins 1,2 million de morts…
L’affrontement se teinte, cette fois, d’un darwinisme social qui, plus que la victoire, aspire à l’extinction d’une race et de sa civilisation.

Cette tragédie est soigneusement mise en lumière grâce à une multitude de documents organisés de façon chronologique et thématique.
Tous les évènements évoqués dans la BD sont soigneusement explicités et font sens avec une bonne lecture de l’histoire.

 Cet excellent album n’oublie pas d’ouvrir le débat sur des questions cruellement d’actualité.
Après les évènements, la jeune et fragile république d’Arménie fut intégrée à l’URSS et de nouveau prise en étau entre les intérêts de la Russie et une Turquie qui va développer un négationnisme d’état.
Plus récemment encore, l’Azerbaïdjan menait la guerre contre l’Arménie à propos de l’enclave du Karabagh.

Un excellent album et un outil au service des jeunes et des moins jeunes pour mieux appréhender les réalités et les enjeux autour du génocide des arméniens.
Un coup de coeur d’Opalivres ♥ !