BANDE DESSINÉE – Dès 14 ans **
De Bernard SWYSEN
Dessin et couleurs de PTILUC
Editions Dupuis – Collection (La véritable histoire vraie) – 20,95 €
Après Hitler voici la « véritable histoire vraie » de Joseph Staline.
Swysen et Ptiluc conjuguent leur talent pour nous conter et mettre en scène l’itinéraire d’un « monstre » comme l’histoire en génère quand un ancien monde se meurt sans que le monde nouveau n’émerge pas encore !
A Swysen revient la tâche de documenter, d’analyser et mettre en perspective les multiples facettes du personnage et bâtir un scénario sur un axe du temps qui court de la fin du XIX° siècle à la chute du stalinisme.
Bernard Swysen est un scénariste et dessinateur belge de bande dessinée, il dirige et scénarise la collection « La véritable histoire vraie » aux éditions Dupuis, dont les premiers titres sortent en 2018. Il brosse avec humour et piment le portrait des « méchants » de l’histoire en respectant scrupuleusement la réalité.
A Ptiluc revient la charge de mettre en scène cette saga dans un improbable bestiaire où Staline est tout à la fois le personnage central, l’exégète et le contempteur de sa propre vie.
Ptiluc est un dessinateur de BD mettant souvent en scène des animaux. Ici, Staline prend les traits d’un ours (avec moustache), animal extrêmement dangereux dans la nature, prêt à tout pour parvenir à ses fins.
NB : page 91 de cette BD, Staline reçoit un livre «Animals farm» écrit par Georges Orwell (1945) qui raconte l’histoire d’un groupe d’animaux (!) qui recherche une vie meilleure dans leur ferme et qui, au bout du compte se retrouve dans une mauvaise situation. Fable qui selon son auteur retracerait l’histoire de la révolution russe.
Comme à chaque fois, Ptiluc se plaît à glisser quelques personnages de la BD belge ou du cinéma d’animation américain dont raffolait le même Staline !
Peu ou pas d’encadrés pour aider le jeune lecteur à préciser le contexte historique mais seulement des dates, des lieux et quelques sticks.
C’est le dessin et le graphisme qui plantent le décor et installent le récit dans un tourbillon au rythme endiablé.
Ce sont les textes des bulles qui explicitent dans un langage décalé et souvent trivial les questions politiques et géopolitiques les plus complexes que complète l’exégète Staline avec la bonhommie cynique qui est lui est propre.
« Ceux qui ne peuvent se rappeler le passé sont condamnés à le répéter » G. Santoyana
Le 18 décembre 1878 à Gori, en Géorgie, naît le petit Iossif Djougachvili (dit Sosso). Son enfance n’est pas rose, son père est un violent alcoolique. Malgré l’interdiction paternelle, le jeune Joseph parvient à aller à l’école, c’est un élève brillant destiné à devenir prêtre !
Mais très rapidement il adhère aux idées de Karl Marx. Il vit alors dans la clandestinité entre les arrestations et les évasions.
Après avoir éliminé un à un ses concurrents et malgré les réticences de Lénine, Staline (son pseudonyme, qu’il a choisi, signifie « l’homme d’acier ») obtient le poste de Commissaire du peuple aux nationalités puis celui de Secrétaire général du parti communiste qu’il va mettre au cœur de l’appareil d’état pour, en un demi-siècle, faire de la Russie la deuxième puissance mondiale.
Le stalinisme, cette redoutable machine à broyer les hommes et les peuples est en marche au service d’un homme et d’une certaine idée de la grandeur de la Russie.
Tout est bon pour éliminer la moindre opposition : sabotages, procès truqués, falsifications de documents, déportations massives, …
Tout est bon pour satisfaire sa démesure et conforter son pouvoir : propagande, invasions des pays voisins (Pologne, Tchécoslovaquie …) et plusieurs millions de morts !
Staline meurt le 5 mars 1953, seul avec son délire paranoïaque,seul dans une URSS puissante qu’il aura construite sans le peuple, lequel se trouvera fort dépourvu quand, le stalinisme s’effondrant, viendra le temps du libéralisme sauvage !
Comme avec Hitler, c’est par l’ironie et la dérision que Swysen et Ptiluc évoquent les grandeurs et les horreurs du « monstre » Staline.
C’est caustique et décapant souvent glaçant mais redoutablement efficace quand on veut évoquer l’ère stalinienne sans tomber dans le pathos ou la célébration aveugle.
La BD met en scène et suggère sans imposer des vérités toute faites et c’est le grand mérite de cette BD historique comme toutes celles de la série.
C’est un véritable livre d’histoire très documenté, avec beaucoup d’humour au niveau du texte et des dessins qui se ferme par un remarquable dossier sur :
-les étapes successives du développement de l’empire russe de 1300 à 1914
– la fin dramatique des Romanov
Cette collection permet de se rappeler, de compléter, de connaître ces « méchants » qui ont sévi.
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