DOCUMENTAIRE – Dès 14 ans
De Christel Bories
Illustré par Rachid Maraï
Éditions Dunod – 12.90 euros
La maman ( l’auteure) enrage : diplômée de HEC, elle a fait carrière dans l’industrie et préside aux destinées de 10000 salariés mais constate avec amertume que sa fille se dérobe, en troisième de collège, à un stage de découverte en usine pendant que son fils refuse la perspective d’une carrière dans l’industrie que lui ouvrirait une orientation vers une « prépa ingénieur »…
Forte de ses convictions et de son expérience, elle va affronter le débat avec ses ados pétris d’une culture médiatique qui colporte les pires clichés sur le monde de l’industrie…et tant pis pour « la prise de tête ».
L’esprit de la « sitcom » se meut vite en une maïeutique socratique qui accouche au fil des échanges d’une vision de l’industrie aux antipodes des clichés qui nourrissent nos ados.
A mesure que l’on avance, les clichés tombent :
– les classifications INSEE perdent sens quand la production industrielle est le résultat de l’interaction de multiples services, où les services développent la production d’objets industriels et que se fait jour la notion de « chaînes de valeurs ».
– les délocalisations tant décriées créent de la richesse en France et contribuent à l’émergence de marchés nouveaux qui font reculer la misère partout dans le monde.
– la désindustrialisation s’avère, elle, un mal sournois qui détruit nos capacités d’innovation et nous met hors-jeu dans une économie globalisée qui fait de l’économie autarcique une dangereuse illusion.
– la destruction des emplois les moins qualifiés et son cortège de misères cachent l la création emplois plus qualifiés qui ne trouvent pas preneurs.
– la robotique a mis fin au travail pénible et répétitif et l’ouvrier se fait opérateur qui conduit sa machine tout en veillant à la qualité, la maintenance de première urgence et le contrôle de la sécurité pour des salaires nettement plus élevés que dans les services.
– un monde d’hommes où le nombre des femmes progresse rapidement dans les emplois les plus qualifiés.
– un monde amoral où l’éthique des hommes et des femmes joue un rôle de plus en plus important qu’il s’agisse d’environnement ou de sécurité.
– une France où la capacité entrepreneuriale est faible et qui laisse les autres pays faire de la richesse avec le résultat de sa recherche.
Un interlude complet en appelle à un condensé d’histoire qui oublie les temps de l’esclavage mais nous conte l’histoire de l’industrie depuis l’homo faber jusqu’à la troisième révolution industrielle en passant par le temps des manufactures et du taylorisme.
Des recours à des illustrations de style BD aèrent cette maïeutique exigeante (le coq gaulois qui cocoricote en chinois est très parlant….).
Les concepts essentiels et le vocabulaire économiques sont mis en valeur et explicités dans des encadrés en marge du texte et dans un lexique très bien fait en bout de livre.
Des bulles incluses dans le texte permettent des citations dont le lecteur pourra tirer le meilleur parti à charge ou à décharge des sujets traités. Elles vont d’Hector Malot à Adam Smith en passant par Lavilliers, Kerry James ou Marx et Engels….
Voilà un excellent ouvrage séduisant qui parle quelle que soit la page où on l’ouvre et qui, dans sa continuité, constitue un remarquable traité d’économie à la portée de tous.
Nous le conseillons aux lycéens, aux étudiants, à leurs parents et à tous ceux qui dans le monde économique ou ailleurs voudraient faire croire qu’il suffit de promouvoir le travail manuel pour sortir de la crise… Nos deux adolescents ne s’en laisseront assurément plus conter …
A noter que cet ouvrage a servi de support pour les tables rondes de la Semaine de l’Industrie à la CCICO regroupant collégiens, lycéens et étudiants de l’université face au monde économique.
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