BANDE DESSINÉE – Dès 13 ans
de Frédéric RICHAUD pour le scénario
Yvan GIL pour le dessin
D’après le roman « Il neigeait » de Patrick RAMBAUD
Éditions Dupuis – 15,50 €
C’est avec bonheur que nous retrouvons les talents conjugués de Gil pour le dessin et Richaud pour le scénario au service d’une fresque historique éblouissante qui promène le regard de Rambaud sur la Campagne de Russie.
Un exposé historique rigoureux débarrassé des oripeaux de la gloriole impériale comme de la longue litanie des batailles et des traités introduit le sujet et montre clairement l’infernal engrenage géopolitique qui conduit Napoléon, en 1812, à envahir la Russie à la tête d’une armée de 500000 hommes.
Quelques images suffisent ensuite à nous donner une vision panoramique de la multitude d’une armée en marche puis la mise au point se précise pour nous donner à comprendre que rien ne va comme il devrait :
– depuis quatre mois on avance à marche forcée vers du vide en ruine…
– l’intendance ne suit pas et la famine guette hommes et chevaux…
– batailles sans vainqueurs ni vaincus qui se résument à des carnages aux canons qui laissent des cadavres d’hommes et de chevaux par dizaines de milliers…
Le dessin donne ensuite des visages à la multitude…
– voilà le capitaine picaresque à souhait qui exhibe la main perdue au combat, prêt à « embrocher du Mongol » symbole de cette soldatesque qui cherche en vain « l’ennemi qui le fera héros » et charge sabre au clair dans Moscou vide.
– voilà Paulin et son bourricot qui éclaire de sa candeur naïve l’arrogance ambiante
– voilà Masquelet le cuisinier de Napoléon qui dans ce tumulte se soucie d’abord de la fricassée de l’Empereur
– voilà Roque le scribe venu pour une carrière impériale et qui a été recruté parce qu’il formait les lettres avec élégance et qui en pince pour Ornélia la belle « théâtreuse » à laquelle le capitaine céderait bien son lit…
Il y a l’Empereur, pathétique et dérisoire avec ses babouches, qui se désespère de l’Empereur russe qui refuse le combat et lui vole son triomphe….quand il ne soucie pas de voir installé le portrait de son fils qui régnera sur le monde quand il aura, lui Napoléon, conquis l’Inde !
Il y a aussi, sortis de nulle part, le libraire, la troupe de théâtre …. vestiges d’un passé glorieux d’un « Siècle des Lumières » que la Russie célébrait jadis et qui périclite sous les fastes de l’Empire napoléonien.
Tous, personnages en quête d’un rôle social à la hauteur de leur égo dans le vide ambiant !
Mais le dessin redevient panoramique……Moscou explose et la tragédie s’embrase. Il faut fuir !
Dans ce sauve qui peut…un chariot qui verse et voilà le futur Stendahl, commissaire au ravitaillement, qui se console de la farine perdue par la trouvaille qui a été la sienne d’un ouvrage de Voltaire et qui s’inquiète de ce que retiendront les futures générations de ce naufrage…
En une image c’est toute la problématique de l’histoire immédiate et de l’histoire longue qui est posée.
Mais, comme pour répondre à cette interrogation, surgit l’image brumeuse d’un sapeur du génie, sa hache à la main, un pontonnier peut être, ceux- là vont vers le destin qui les fera « héros »…..et vont transformer un désastre en légende glorieuse….
Cela sera sans doute conté dans les saisons deux et trois de la saga que nous attendons avec impatience !
Bravo pour cette éblouissante fresque historique !
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