DOCUMENTAIRE – Dès 13 ans
Paul SCHUTTEN pour le texte
Floor RIEDER pour les illustrations
Traduit du néerlandais par Maurice LOMRE
Éditions l’École des Loisirs – 24,80 €
Pour percer « le mystère de la vie », il faut solliciter tous les domaines du savoir, interroger et expliquer la démarche des chercheurs puis inscrire les résultats de leurs travaux dans un récit cohérent que l’on mettra en parallèle avec ceux plus empiriques et dogmatiques que les hommes ont inventés dans leur quête métaphysique des origines de la vie, tels sont l’ambition et le projet de cette équipe néerlandaise.
Ce remarquable travail débouche sur un ouvrage à la fois sobre et cérémonieux dans sa brochure soignée et dorée sur tranche qui tient beaucoup de ces carnets de travail organisés en chapitres avec titres, sous-titres et des croquis à la main qui veulent contribuer à garder la mémoire d’un intense travail de réflexion.
C’est bien la rigueur et l’austérité qui prévalent dans une démarche tout aussi scientifique que métaphysique même si parfois un peu d’humour allège le propos quand les évidences scientifiques
peuvent heurter les dogmes des récits fondateurs ou quand le vocabulaire scientifique se fait par trop ésotérique.
Inutile de dire que cet album n’ira pas spontanément vers le jeune public !
Mais disons avec la même force que si on fait l’effort d’aller vers lui il ne vous lâche plus !
Essayons de nous y aventurer un peu !
Toutes les disciplines du savoir sont sollicitées :
– tout est d’abord dans un questionnement très socratique à partir de la métaphore du robot et de la paramécie « vivre c’est mourir mais aussi se reproduire… », « Comment la vie naît-elle de l’inerte ? »
– puis voilà le mathématicien, l’astro-physicien, le biologiste qui nous embarquent dans un voyage dans l’infiniment grand et l’infiniment petit pour situer l’âge de la terre (au moins 4, 6 millions d’années) et les distances dans l’univers (au moins 13 milliards d’années lumières)
– avec les géologues, les naturalistes, les paléontologues, voilà Darwin qui a la meilleure idée scientifique de tous les temps « toutes les espèces ont un ancêtre commun…les populations augmentent beaucoup plus vite que la nourriture dont elles disposent… le monde change et ce sont les espèces qui s’adaptent…seules survivent celles qui s’adaptent le mieux…pourquoi et comment
changent-elles ? » « Commence l’adaptation au déplacement et à la diversification de la nourriture… on finit par manger son semblable…on chasse et on se défend…vient l’ère de la proie et du prédateur …de la chaîne alimentaire… »)
– au service de cette évolution continue et avec le biologiste et l’astro-physicien, plongeons au cœur de l’infiniment petit et projetons nous dans l’infiniment grand de l’univers pour nous laisser conter l’épopée du génie biologique qui fait la vie et dont les héros ont pour noms : « bactéries…acides aminés…protéines…acide désoxyribonucléique – ADN qui n’est rien sans…acide ribonucléique – ARN…gènes »
L’essentiel étant dit, il reste aux deux auteurs à mettre un peu de fantaisie dans un propos souvent austère.
Ils y réussissent à l’aide de croquis et de tableaux à la fois humoristiques et didactiques et en promenant la mascotte de « Gérard Legrand de Coinperdu » toujours aux prises avec son capital
génétique et celle de « Tiktaakik » ce fossile inuit mi-poisson mi-amphibien qui, trouvé en 2004, vient prouver avec éclat la vie sortant de l’eau.
Il leur restait aussi à instruire le débat avec les créationnistes.
Ils le font avec talent et sans sectarisme aucun en établissant des évidences chronologiques et en se basant sur des exemples concrets, des acquis les plus récents de la biologie génétique.
Ils disent enfin, un peu mollement, que la science n’a pas vocation à apporter des réponses scientifiques à des interrogations métaphysiques et que dans le domaine de la recherche
scientifique, il n’existe pas de dogmes.
Ce qui est vrai aujourd’hui peut ne plus l’être demain.
Nous sélectionnons ce livre pour les collégiens et les lycéens à partir de la classe de quatrième en redisant qu’il est, c’est évident, d’une approche difficile.
NDR : A l’issue de leur travail, les auteurs s’autorisent quelques extrapolations sur des évolutions possibles liées notamment à la révolution numérique.
C’est un débat très intéressant qui pourrait prolonger la lecture du livre de façon très intelligente et qui pourrait aussi porter sur la place de l’intelligence des femmes dans la sélection sexuelle telle qu’évoquée dans le tableau de la page 58…
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