Entre nous et le ciel

ROMAN – Dès 14 ans **
 de Claire Gratias
 Éditions Rageot – Collection (In love) – 10,50€

Qu’est-il arrivé à Manon ?

Des témoins, une enquête = un polar.
5 actes, deux héros passionnés et malheureux = une tragédie.
L’Amour contrarié = un roman.

Qui retiendrait ses larmes à la lecture de cette superbe actualisation de Manon LESCAUT ?
Les lycéens comme les adultes dévoreront ce roman qui pourrait faire l’objet d’une étude approfondie en cours de français.
Claire GRATIAS tient en effet magistralement le pari d’une création (plus que d’une réécriture) inspirée de l’abbé PREVOST.

Le thème de l’amour maudit est traité avec une maîtrise parfaite de l’écriture.

– Gommer les questions posées aux témoins permet de personnaliser au maximum les propos tenus (syntaxe, vocabulaire, brièveté, vivacité, froideur, émotion … ou non). Les personnages existent donc sous nos yeux non seulement dans leur relation particulière à Manon mais aussi dans le dialogue avec l’enquêteur effacé.

– La structure de l’histoire reflète exactement la trame originelle. Une étude comparative est suggérée par l’auteur qui donne des pistes dans la postface (symbolique des prénoms, choix de la composition en actes…). On retrouve aussi la jeunesse des héros, l’aveuglement amoureux de l’un, la frivolité de l’autre, les difficultés à se procurer de l’argent, la dérive malhonnête, la fin dramatique.

– Seule la brièveté relative du texte diffère du roman dense et plus moralisateur. Le dépoussiérage des aventures permet ici de se centrer sur l’essentiel afin de conserver une dynamique liée au genre policier et plus adaptée à notre époque pressée.

– Le titre reprend les propos du héros Valentin persuadé comme le Chevalier que le destin (favorable ou non) le guide dans cet amour absolu : la morale commune ne s’applique plus car les actes proviennent d’une volonté supérieure. Fatum…

– L’auteur fait ici le choix judicieux d’une héroïne absente de la scène, ce qui accroît la tension dramatique ; évoquée en creux, sympathique dans sa détresse palpable au travers de ses égarements, Manon devient au fil des pages l’intaille d’un bijou antique et fragile, précieusement exhumé de la mémoire des uns et des autres.