ROMAN – Dès 13 ans
De Meg GREHAN – traduction d’Aylin Manço
Editions Talents hauts – 14 €
Talents Hauts nous a habitués depuis sa création à de beaux textes féministes.
Cette maison d’édition qui prône l’égalité filles/garçons avec vigueur, humour, légèreté, gravité, et avec un très fort esprit de conviction, nous a réservé une belle surprise.
« En apnée », roman irlandais, aborde avec infiniment de délicatesse le sujet de la découverte de l’homosexualité féminine.
Maxime est une petite fille (10 ? 11 ans ?) qui vit avec sa mère uniquement.
Elle sait qu’elle a « un drôle de prénom parce que les médecins avaient prévu un garçon ».
Et quand elle a « débarqué, toute visqueuse et remuante, une petite fille, maman y tenait trop ».
Elle était Maxime, elle resterait Maxime.
Maxime va à l’école et partage un banc avec Chloé.
Les filles d’un côté, les garçons de l’autre.
Maxime est une curieuse insatiable et lit beaucoup de documentaires.
Elle veut tout savoir !
Mais ce qu’elle connaît le mieux, c’est elle-même. Il y a juste une question qui reste sans réponse.
Peut-être la cherche-t-elle dans les livres ?
Maxime est anxieuse, et tout savoir la rassure : elle fait des cauchemars où elle est sous l’eau, prête à étouffer, elle est hantée par des catastrophes probables, elle commence souvent ses phrases par « et si… » qui inquiètent sa maman.
Et si Maxime était amoureuse de Chloé ?
Maxime parle de Chloé, Maxime décrit Chloé, Maxime raconte ce que fait Chloé, Maxime n’a plus de voix quand Chloé lui parle.
Oui, Maxime est amoureuse de Chloé.
Elle le pressent, sans en être sûre et fait une recherche sur internet : « Ca fait quoi d’être amoureuse ? ».
Elle tente de parler à sa maman de cette situation qui fait « comme un grand trou dans tout » ce qu’elle sait.
Mais elle s’empêtre, énonce des choses qui ne paraissent pas avoir de sens, et sa mère ne lui donne pas de réponse, contrairement à son habitude.
Le lecteur adulte, quant à lui, pense qu’elle a probablement compris mais que la surprise la laisse sans voix.
Un jour sans classe où la petite fille est seule à la maison, elle se rend à la bibliothèque pour trouver LA réponse.
Mais « aucun livre ne parle d’une princesse avec une princesse, ou d’une reine avec une reine ».
« Je suis perdue, se dit Maxime, je ne me suis jamais sentie aussi perdue ».
Suzanne la bibliothécaire, fine psychologue, lui vient en aide sans tourner autour du pot, elle lui trouve des bouquins qui vont lui donner des réponses.
Enfin, la mère de Maxime, prévenue par Suzanne, rejoint sa fille à la bibliothèque et lui propose de parler de Chloé.
« D’accord, j’ai compris », conclut-elle.
Le texte complet est présenté comme un poème en vers libre, à la première personne du singulier, avec des retours à la ligne systématiques.
Ce procédé donne à l’ensemble une allure onirique, mais à bien y regarder, et en se référant au titre, il est en rapport avec le principe de respiration.
Il tente de donner au lecteur une idée de la difficulté de l’héroïne à respirer calmement.
Il reflète aussi ses angoisses et ses cauchemars d’enfermement sous l’eau.
Le phrasé est saccadé, son cœur bat très fort et l’empêche de reprendre son souffle, de parler en flot continu.
Elle est en apnée perpétuelle, devant les sentiments qui l’envahissent, devant son questionnement, devant Chloé.
Le rendu est parfait.
Avis
Il n’y a pas encore d’avis.