ROMAN – Dès 13 ans **
de Tristan KOËGEL
Éditions Didier Jeunesse – 14,20 €
BLUEBIRD est un roman d’amourS…
– D’abord celui instinctif, immédiat, de deux adolescents, Minnie et Elwyn.
En noir et blanc.
La fillette accompagne sur les routes son père musicien itinérant.
Après le décès de son épouse, celui-ci a préféré la liberté pauvre plutôt qu’une existence misérable d’ouvrier agricole dans le sud des États-Unis.
Comme Minnie est blessée à la cheville père et fille font halte dans une plantation.
Là règne le racisme du patron ; c’est à contre cœur qu’un couple irlandais dirige rudement les gens.
Leur fils Elwyn (protégé par un ami indien) est secrètement fasciné par les chants qui rythment les soirées des anciens esclaves au retour des champs.
Il découvre le talent des nouveaux venus.
Des évènements dramatiques séparent les deux jeunes gens alors que leur amitié débute…
– L’autre grande passion amoureuse est celle de la musique :
Le blues innerve tout le récit, provoque les premiers heurts et encourage les départs.
Chant de travail des humbles pour trouver la force de survivre, il agace le patron.
Essence même de leur être, il permet aux passionnés de s’émanciper en ville.
La vitalité exacerbée du jazz a même le pouvoir de mettre en transe le public venu écouter, oublier, ce qui nous vaut quelques pages drôles.
Le texte tente de faire comprendre la force de cette musique et comme les mots ne suffisent pas, un lien bienvenu à la fin du livre propose d’écouter quelques standards.
Enfin, grâce à son imprégnation musicale dès l’enfance, Minnie – l’oiseau bleu trouvera la célébrité après bien des épreuves…
– L’amour c’est aussi l’élan de tendresse humaine pour autrui, propre à la communauté black.
Il donne un ton de gentillesse à l’ensemble ; on partage matériellement le peu que l’on possède et le chagrin comme la joie de vivre.
Dans un tel contexte l’auteur peut tenir le pari optimiste qu’une coopérative autogérée réussira.
L’atmosphère se détend avec une mascarade, la pseudo-mort de l’ancien maître évincé, et avec la comédie du contremaître-faux-tyran jouée dans un dessein généreux d’égalité et de partage des terres.
Il ne fallait pas se fier aux apparences !
Hormis les figures-repoussoir, les protagonistes évitent la violence, réalisent leurs rêves en s’entraidant.
L’alternance des narrateurs varie les points de vue non seulement pour surprendre le lecteur mais aussi pour être une leçon de tolérance.
La vérité n’est pas unique…
Le livre permet donc de rêver d’une société modèle, idyllique mais il est solidement documenté.
Il informe sur le blues dont les notes bleues (c’est-à-dire altérées) reflètent les états d’âme nostalgiques exprimés par les paroles (quelques textes sont fournis).
Le bogie endiablé joué au piano lors de la fête, l’évolution du style, le mépris de la classe aisée à l’égard du jazz, donnent une idée exacte de la pratique musicale en vogue à partir de 1920 que ce soit dans le delta du Mississippi ou dans les clubs de Chicago.
D’autre part le contexte social de ségrégation transparaît dans le quotidien des personnages : haine, pendaisons, « lois » de Jim Crow.
La présence de Nashoba, indien sage comme ses ancêtres, fidèle à sa parole, rappelle l’autre persécution et la 2° guerre mondiale.
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